Pour son tout dernier voyage officiel, Jacques Chirac s'est rendu en Allemagne, où il a salué aux côtés d'Angela Merkel l'acquis considérable que représente pour lui l'amitié franco-allemande.
"L'amitié franco-allemande, l'union entre l'Allemagne et la France a permis d'implanter la paix et d'affermir la démocratie en Europe", a souligné jeudi le président français lors d'une cérémonie à la Chancellerie fédérale.
"C'est un acquis considérable", a-t-il ajouté. "Aujourd'hui, les jeunes Français se sentent absolument chez eux en Allemagne. Ils n'ont plus l'image du passé. Il en va de même pour les jeunes Allemands en ce qui concerne la France".
"C'est une extraordinaire réussite. Il faut prendre soin de la conforter en permanence", a-t-il dit à l'adresse de celui ou celle qui lui succédera à l'Elysée. "L'accord franco-allemand est à la base même de la construction européenne".
"Nous avons beaucoup d'ambition" et beaucoup reste à faire, a-t-il ajouté, évoquant l'écologie, l'approvisionnement énergétique, le développement des pays pauvres, l'économie et "l'affermissement de notre modèle social européen".
"Tout cela, nous le ferons ensemble ou ça ne sera pas bien fait", a-t-il prévenu.
Debout à ses côtés, Angela Merkel a salué l'oeuvre de Jacques Chirac au service de la réconciliation franco-allemande lors de ses douze années passées à la tête de l'Etat français.
La chancelière s'est souvenue qu'il avait été, en 2000, le premier chef d'Etat à prendre la parole devant les députés allemands dans le Reichstag reconstruit.
"Personnellement, je veux te remercier de m'avoir donné la possibilité de profiter de ton expérience, qui m'a été extrêmement utile dans mon action de chancelière", a ajouté Angela Merkel, arrivée au pouvoir fin 2005.
"Vive l'amitié franco-allemande!", a-t-elle lancé en français.
Cette rencontre à Berlin rappelle celle du 14 octobre 2005, jour où Jacques Chirac avait invité à dîner à l'Elysée le chancelier allemand Gerhard Schröder, alors sur le point de céder sa place à Angela Merkel.
"TRES SYMBOLIQUE"
A trois jours du deuxième tour de l'élection présidentielle française, les plus hautes autorités allemandes ont ainsi rendu la politesse au président français.
"C'est avec beaucoup d'émotion que j'ai répondu à ton invitation", a dit Jacques Chirac à son hôte. "Que mon dernier voyage officiel soit en Allemagne est pour moi très important et très symbolique."
Avant de prononcer ces quelques mots devant la presse, le président et la chancelière ont eu droit aux honneurs militaires rendus par un détachement mixte de la brigade franco-allemande, symbole de la naissance de l'Europe de la défense.
Après avoir écouté les hymnes des deux pays, ils ont passé en revue les troupes alignées dans la cour de la Chancellerie et discuté avec quelques soldats.
Lors de l'entretien et du dîner de travail qui ont suivi, Jacques Chirac a notamment marqué l'appui de la France aux efforts de l'Allemagne sur la question des institutions en Europe. Il a par ailleurs souligné l'importance de la création d'un tribunal à caractère international au Liban.
Le développement en Afrique, l'Iran, la Turquie et les rapports entre l'islam et l'Occident étaient aussi au menu des discussions.
La chancelière a offert au président un plan de rosier du jardin de l'ancien chancelier Konrad Adenauer, symbole de paix.
Autre cadeau: un album-photo électronique contenant une sélection de clichés représentant Jacques Chirac avec les différents chanceliers depuis Helmut Schmidt, en 1974, jusqu'à aujourd'hui, ainsi que des photos de la chute du mur de Berlin. Selon un décompte allemand, le président s'est rendu 33 fois en Allemagne depuis son accession à l'Elysée en 1995.
Lors des prochains grands rendez-vous internationaux - sommet du G8 et conseil européen, en juin, tous deux présidés par l'Allemagne - la France sera représentée par le successeur de Jacques Chirac, dont le mandat expire le 16 mai.
Les deux candidats en lice, la socialiste Ségolène Royal et l'UMP Nicolas Sarkozy, ont tous deux annoncé qu'ils se rendraient très rapidement à Berlin s'ils accédaient à l'Elysée.
Selon son entourage, Jacques Chirac a suivi de bout en bout mercredi soir, comme plus de 20 millions de Français, le débat télévisé entre les deux prétendants à sa succession.
Angela Merkel en a aussi vu une bonne partie, a fait savoir un diplomate français. La chancelière a interrogé le président sur la campagne tricolore, qu'elle "suit très attentivement', a-t-on ajouté de même source.
Dans l'avion qui l'emmenait à Berlin pour ce dernier voyage officiel, Jacques Chirac a pris soin, comme il le fait parfois, de saluer un à un tous les passagers - membres de son service de sécurité, diplomates, secrétaires, médecins, etc.
"Que faites-vous là au lieu de vous occuper de la campagne ?", a-t-il plaisanté devant les quelques journalistes présents. "En tout cas, j'y suis sensible."