Une note interne remontant à 1998 met Total dans une situation délicate dès le deuxième jour des audiences.
Dans cette note, éditée en 1998, un an avant le drame de l’Erika, le groupe pétrolier s'inquiètait de sa responsabilité d'affréteur en cas de catastrophe maritime, une responsabilité qu'il nie pourtant aujourd'hui.
"Même en l'absence de texte, la responsabilité d'un affréteur peut toujours être recherchée sur le terrain délictuel ou quasi-délictuel pour faute ou négligence dans le choix du navire", écrivait un an avant le naufrage de l'Erika l'un des prévenus, Bertrand Thouillin, alors directeur des affaires juridiques du service trading/shipping de Total.
"Il y a une tendance générale des juges à mettre en cause la responsabilité des +donneurs d'ordre+" en matière de transport", mettait encore en garde Bertrand Thouillin, dont la note visait pourtant à renforcer la sécurité puisqu'elle prônait le renforcement du "vetting", l'inspection des navires effectuée par les compagnies pétrolières elles-mêmes.
Ce type d'inspection s'est développé dans les années 90, après que la compagnie avait revendu en 1991 ses propres bateaux pour ne plus être qu'affréteur.
"Le moins que l'on puisse dire, c'est que c'était prémonitoire", a reconnu à la barre Bertrand Thouillin, alors que les quelque 70 parties civiles, collectivités bretonnes en tête, comptent sur les profits record de Total pour obtenir des indemnisations substantielles.
L'Erika, un bateau de mauvaise augure
Mardi, le président a retracé la naissance défavorisée et la jeunesse mouvementée de l'Erika.
Le navire était né en 1975, sous les mauvais auspices d'un chantier japonais qui l'avait construit, au niveau des normes de sécurité, "sans marge de sécurité par rapport aux standards de l'époque", a remarqué le président.
Durant ses quinze premières années, il a changé cinq fois de propriétaires, et arboré les pavillons de complaisance de Panama puis du Liberia, sans compter deux échouages, des dégâts sur une citerne, la déformation d'une cloison et des avaries par gros temps.
Le président a aussi annoncé qu'il joignait au fond, c'est-à-dire qu'il statuerait à la fin du procès, sur la demande d'immunité de la compagnie de classification Rina.